Publié le : 15 septembre 20215 mins de lecture

Barack Obama a rassemblé des légions de militants et a suscité l’espoir en promettant de changer l’ordre des choses. Il a parlé avec passion de dépasser les clivages partisans, il s’est engagé à mettre un terme aux abus de pouvoir du gouvernement Bush et il a désavoué les grands financiers, ces nouveaux faiseurs de rois qui ont corrompu la classe politique de Washington. Mais, aujourd’hui, il semble être un tout autre candidat. Il a d’abord rompu sa promesse de limiter aux seuls fonds publics le financement de campagne des deux principaux partis. Ses conseillers ont expliqué sa décision de renoncer au financement public de sa campagne en disant qu’il s’appuyait sur un réseau de donateurs individuels venus des quatre coins des Etats-Unis et que, s’il renonçait aux fonds publics, il refusait également les dons des grands argentiers. Ces jours-ci, il est pourtant à la recherche de riches particuliers prêts à miser gros sur lui. Son équipe de campagne s’apprête à organiser dans les prochaines semaines une dizaine de grandes soirées où le prix du billet d’entrée pour passer un peu de temps aux côtés du candidat démocrate dépassera les 30 000 dollars par tête.

Le nouveau Barack Obama a également abandonné l’idée de bloquer, au Sénat, une loi sur la surveillance électronique contenant une clause d’immunité pour les compagnies téléphoniques, ce qui revient à couvrir les écoutes illégales mises en place par le gouvernement Bush après les attentats du 11 septembre 2001. En janvier 2008, il soulignait pourtant l’efficacité de la loi de 1978 instituant un tribunal spécial ainsi que des garde-fous pour la mise sur écoutes de citoyens américains. “Nous avons les moyens de repérer, de suivre et de démasquer des terroristes tout en garantissant que les mesures prises par le gouvernement font l’objet d’un contrôle minutieux et ne nuisent pas aux droits et aux libertés que nous défendons”, avait-il alors déclaré. A présent, le sénateur de l’Illinois accepte la clause d’immunité accordée aux sociétés ayant participé à des écoutes illégales. Cette démarche qu’il qualifie de “compromis” n’est rien d’autre qu’une manœuvre cynique, classique de Washington, qui restreint le pouvoir du tribunal spécial, supprime presque tout contrôle et donne plus que jamais carte blanche au gouvernement pour surveiller les citoyens.

Le Barack Obama des élections primaires clamait également haut et fort qu’il saurait tenir tête aux groupes d’intérêt et qu’il leur dirait leurs quatre vérités. A présent, il explique aux chrétiens évangéliques qu’il souhaite étendre les mesures du président Bush redistribuant une partie des fonds de l’Etat à des organisations religieuses. Non seulement cette pratique constitue une violation du principe de la séparation de l’Eglise et de l’Etat, mais en plus elle transforme un devoir de l’Etat en une œuvre caritative.

Nous sommes également en profond désaccord avec le nouvel Obama sur deux sujets : la peine de mort et le contrôle des armes. Le candidat a approuvé la décision de la Cour suprême du 26 juin de casser l’interdiction des armes à feu en vigueur dans la capitale fédérale. Nous savions qu’il souscrivait à la mauvaise interprétation de la constitution des militants pro-armes qui estiment que le second amendement constitutionnel garantit un droit individuel à porter une arme. Mais il a été affligeant de l’entendre dire que le récent jugement de la Cour suprême contenait un ensemble de “mesures raisonnables pour les communautés locales afin de garantir la sécurité de leur quartier”. Nous avons également été consternés d’apprendre son désaccord quant à la décision de la Cour suprême du 25 juin d’interdire la peine de mort lors de crimes sans homicide.

Il n’est pas surprenant de voir un candidat à la présidentielle se rapprocher du centre de l’échiquier politique à l’approche du scrutin. Mais les revirements de Barack Obama sont particulièrement frappants parce qu’il était le candidat qui voulait changer la politique, un homme aux convictions fortes qui refusait de jouer selon les règles traditionnelles.
Barack Obama et John McCain se différencient encore largement sur des sujets comme l’Irak, les impôts, la sécurité sociale et la nomination des juges à la Cour suprême. Nous n’accepterons pas d’autres “ajustements” sur ces questions. Ce pays a besoin de changement et de pouvoir y croire.